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Cultivé, cultiver

  Le clin d’oeil du mois de novembre 2017

Lorsqu’on utilise ou qu’on entend nos mots de tous les jours, on oublie ce qu’ils racontent de nous, de notre histoire de société, de notre culture.

La culture est un socle, une base solide de la compréhension entre les êtres, entre les peuples. On enferme dans ce mot la somme des éléments d’histoire, d’art, de littérature et d’éducation d’une société. Pourquoi dit-on de quelqu’un qu’il est cultivé ? Et pourquoi emploie-t-on ce même mot pour parler d’une terre ?

Allons à la source : « culture » vient du latin cultura : « habiter » ou « honorer », qui vient lui même du verbe « colere, cultus » qui signifiait « cultiver », soigner ». C’est plutôt rassurant de voir que la culture pourrait avoir des vertus de soin sur l’âme, et qu’à l’origine, on disait « honorer » la terre quand on la cultivait. Si seulement on voulait bien davantage écouter la sagesse des mots issus de nos racines. Tiens, encore un mot qui se rattache à la terre !

Oui, à y regarder de plus près, on trouve quantité de mots et d’expressions issus du monde agricole, qui nous relient, inconsciemment sans doute, à nos origines. Lorsqu’on dit d’une idée qu’elle germe à l’esprit, l’image est puissante car elle sous-entend toute la phase d’incubation et de transformation avant émergence. Les expressions « c’est de la mauvaise graine », pour décrire quelqu’un de peu fréquentable, ou bien « on récolte ce que l’on sème », qui renvoie à notre manière d’agir, ont voyagé dans le temps et nous ramènent à des valeurs de terroir.

Mais continuons de creuser notre sillon et d’explorer nos habitudes de langage : des proverbes, des verbes, des mots égrainés dans nos discours révèlent cette empreinte de la nature sur notre parler. Parfois désuets, ils témoignent pourtant de notre héritage universel lié à la Terre : « Manger son blé en herbe » (dépenser son argent avant de l’avoir gagné) que l’on retrouve plus couramment sous la forme de « mettre la charrue avant les bœufs » (faire les choses dans le mauvais sens) illustrent notre propension à vouloir aller toujours trop vite, sans réflexion, ce qui peut mener par exemple, à se retrouver fauché comme les blés.

Quand on entend dire à tout bout de champ (vient du monde paysan du XVIIe : traverser le champ d’un bout à l’autre pendant le labour ; pour décrire une action répétitive) que la jeunesse manque de maturité, que l’âge mûr est celui de la sagesse, qu’on nous parle de friche industrielle, qu’on dit récolter les fruits de son travail, il est certain qu’on véhicule des images bucoliques sans même s’en rendre compte…

C’est comme un jardin secret, un clin d’œil à notre indéfectible lien à notre Terre- mère.

Le proverbe du mois de novembre : « A la Sainte Catherine, toute plante prend racine ». Prenez-en de la graine !